Après une attente de quatre ans, on m’appelait pour m’annoncer que je serais opérée pour une arthrodèse, le 5 novembre, à l’Hôtel-Dieu de Québec. Quel beau signe de Sa présence alors qu’on m’avait parlé de 4 à 6 mois d’attente! Et cela, malgré la pandémie. J’allais vers l’inconnu car je ne savais pas comment tout allait se passer…
Depuis quelques années, un hymne du Bréviaire m’interpelle1 et m’invite à l’abandon pour laisser au Père toute l’initiative du déroulement des événements à venir. L’occasion de ma convalescence à la Maison Niverville m’a permis de vivre cette expérience que je vous partage.
Accepter de dépendre totalement des autres pour tous mes besoins quels qu'ils soient, m’accueillir dans mes fragilités et mes incapacités, m’abandonner dans la confiance, voilà le passage obligé. Il m’aura permis de poser un regard nouveau sur mon environnement et les personnes qui y travaillaient. C’est surtout sur les préposés à notre service qu’il s’est posé. Cette communion à "l'autre" a transformé ce que je voyais au quotidien : des êtres merveilleux accomplissant une belle mission à l'égard de personnes vulnérables et, chaque fois que c’était possible, je les remerciais. Tous devenaient pour moi, signes de sa Présence.
Comment moi, pouvais-je exercer une présence responsable dans ce climat, avec toutes les personnes?
Dès mon arrivée, lorsqu’un ou une préposée entrait dans ma chambre, je l'accueillais chaleureusement car pour moi, dans mon cœur, je savais qu’il ou elle exerçait un véritable ministère. J’ai personnalisé mon bonjour en attribuant à chacun un surnom: Soleil du matin, Sourire rassurant, Force tranquille, Être de compassion, Semeuse de paix et d'harmonie, etc... Avant mon départ, l’une d’elles est venue me remercier:« Vous savez, votre façon de m’accueillir m’a donné confiance en moi et m’a stimulée pour mieux faire mon travail.»
Ce nouveau regard m’a permis de voir tant d'attentions, de petits gestes qui agrémentaient nos journées. J’étais témoin de leur patience, de leur doigté avec des résidents ou convalescents parfois exigeants, récalcitrants. Dans cette résidence, la diversité de nationalités chez les préposés envoie un message très fort : l’ouverture à la différence, l’acceptation inconditionnelle de l’autre, quel beau message évangélique! Je l’ai souvent rappelé aux résidents, aux convalescents et au personnel quand l’occasion se présentait.
J’ai voulu faire ma part dans l’accueil de ces réfugiés et immigrants, particulièrement les latinos. Je voulais qu’ils se sentent écoutés, compris, aimés et soutenus. Chaque fois que je pouvais, je répondais à leurs questions ou accueillais leurs inquiétudes. Parfois, au moment de leur pause, ils arrivaient avec des mots français écrits dans leur main afin d’en comprendre le sens ou me demandaient comment poser telle question en français. Je me suis sentie participante à leur intégration chez nous!
Avec les africaines, je n’ai pas pu m’empêcher d’établir un parallèle : si, dans ma jeunesse, j’ai pris de petits africains dans mes bras, à 77 ans, ce sont deux Africaines qui m’ont lavée et soutenue dans la marche. Un retour de balancier que je leur ai reflété!
Si ce milieu de vie m’a révélé de grandes forces, il s’y trouve aussi des failles dans le fonctionnement. Cela m’interroge et je cherche comment je pourrais exercer ma responsabilité de citoyenne pour que nos aînés qui y résident, vivent dans un climat de calme, de sécurité et d’harmonie. Que l’Esprit m’inspire pour m’aider à discerner les signes de sa Présence, dans cette démarche!
Céline G, Trois-Rivières,
mars 2021
[1] «Un jour nouveau commence», hymne de Laudes, du deuxième lundi de l’année liturgique.